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Placements financiers, risques et garanties : éclairage de M. M’hamed Bokhari

La récente faillite de la Silicon Valley Bank et de Signature Bank aux USA suscite une crise de confiance à travers le monde. M. . M’hamed Bokhari rappelle que cet effondrement constitue la deuxième plus grande faillite bancaire de l’histoire des États-Unis, après celle de Washington Mutual en 2008. Pour rétablir la confiance, un groupe de banques américaines a proposé d’augmenter le montant des cotisations qu’elles versent déjà à la FDIC pour garantir les dépôts. Onze grandes banques américaines se seraient engagées à déposer un montant global de 30 milliards de dollars sur les comptes de First Republic.

Dans cet entretien, le spécialiste financier M. M’hamed Bokhari nous présente d’abord les différents types de placements financiers pour les particuliers, les entreprises et les compagnies d’assurances. Il nous explique les risques de faillite d’une banque et l’intervention des autorités de réglementation bancaire pour protéger les déposants, en garantissant leurs dépôts jusqu’à un certain montant. Sauver également la banque, lui apporter une assistance financière ou permettre sa reprise par une autre banque.

Nous reviendrons sur cette thématique avec d’autres spécialistes afin d’en savoir davantage sur les risques de contagion, pas seulement aux États-Unis.

Entretien réalisé par Karima Mokrani

Algerieinvest : Les banques offrent une gamme de placements financiers pour les particuliers, les entreprises et les compagnies d’assurances. Pourriez-vous nous présenter les différents types de placements, les gains et les risques éventuels. Commençons par les particuliers

M. M’hamed Bokhari : Pour les particuliers, nous avons d’abord les comptes d’épargne. Ce sont des placements sans risque qui offrent un taux d’intérêt garanti sur les fonds déposés. Les particuliers peuvent ouvrir des comptes d’épargne auprès de leur banque pour faire fructifier leur argent, tout en le gardant accessible. Les intérêts sont généralement modestes mais les comptes d’épargne sont couverts par les garanties de dépôt jusqu’à un certain montant. Ils sont idéaux pour l’argent que vous devez garder liquide. Les comptes d’épargne peuvent avoir des taux d’intérêt allant de 0,01% à 2% en fonction de la banque et des conditions.

Nous avons ensuite les certificats de dépôt (CD). Ce sont des placements à court terme qui offrent un taux d’intérêt plus élevé que les comptes d’épargne. Les CD sont émis pour une durée déterminée, généralement entre 1 mois et 5 ans, et le taux d’intérêt est garanti pendant cette période. Les CD sont des comptes qui rapportent des intérêts plus élevés que les comptes d’épargne. Ils ont des termes fixes et les pénalités pour les retraits anticipés sont courantes. Les CD peuvent avoir des taux d’intérêt allant de 0,05% à 3% en fonction de la durée du terme et du montant investi. Les pénalités pour les retraits anticipés peuvent varier de 3 mois à 1 an d’intérêts.

Nous avons, après, les obligations qui sont des titres de créance émis par des entreprises ou des gouvernements qui versent des intérêts à des taux fixes ou variables. Les obligations sont considérées comme moins risquées que les actions mais elles ont un potentiel de gain plus limité. Les obligations peuvent offrir des taux d’intérêt allant de 2% à 6% en fonction du risque de crédit de l’émetteur et de la durée de l’obligation.

Pour ce qui est des actions qui sont des titres de propriété dans une entreprise, elles peuvent être achetées individuellement ou sous forme de fonds communs de placement et d’ETF. Les actions peuvent offrir des rendements plus élevés que les obligations, mais elles sont plus risquées. Les rendements des actions peuvent varier considérablement en fonction de la performance de l’entreprise et du marché boursier. Sur le long terme, les actions ont historiquement offert un rendement annuel moyen de 8% à 10%.

Les fonds communs de placement et les ETF sont des investissements collectifs dans lesquels de nombreux investisseurs détiennent une participation dans un portefeuille de titres. Ils sont souvent considérés comme des options plus sûres que les actions individuelles, car ils sont diversifiés. Les rendements des fonds communs de placement et des ETF dépendent des performances des titres sous-jacents. Les frais de gestion peuvent varier de 0,05% à 2% en fonction du type de fonds.

 Les ETF ?

Les ETF (Exchange Traded Funds) sont déjà utilisés depuis les années 1990 par les investisseurs institutionnels, tels que les banques privées, les caisses de pension et les organismes publics. Depuis quelques années, ils suscitent un engouement croissant auprès des investisseurs privés. Aujourd’hui, le capital investi dans les ETF au niveau mondial est de 7,86 trillions de dollars. Un ETF vise à reproduire l’évolution de la valeur (la performance) d’un indice donné et à dégager le même rendement (déduction faite des frais liés à l’ETF) que cet indice. C’est presque cinq fois plus qu’il y a dix ans.

Qu’en est-il des entreprises ?

Nous avons, d’abord, les obligations d’entreprise. Les taux d’intérêt sont généralement plus élevés que pour les obligations gouvernementales en raison du risque accru. Ils peuvent varier de 2% à 8% en fonction du risque de crédit de l’émetteur et de la durée de l’obligation.

Les entreprises peuvent émettre des actions pour lever des fonds. Les actions peuvent être achetées individuellement ou sous forme de fonds communs de placement et d’ETF. Les rendements des actions peuvent varier considérablement en fonction de la performance de l’entreprise et du marché boursier.

A citer également les fonds de pension qui sont des programmes de retraite financés par les entreprises. Les fonds de pension peuvent être investis dans une variété de placements, tels que des actions, des obligations et des fonds communs de placement. Les rendements peuvent varier en fonction des types d’investissements et des performances du marché. En 2020, les fonds de pension ont enregistré un rendement moyen de 10,7% aux États-Unis.

Les entreprises peuvent aussi détenir des comptes de placement pour leur trésorerie excédentaire. Ces comptes peuvent être investis dans des fonds communs de placement, des obligations et des actions. Les rendements dépendent des types d’investissements et des performances du marché.

Et pour ce qui est des compagnies d’assurances ?

Les compagnies d’assurance sont des investisseurs importants sur les marchés obligataires. Les obligations sont considérées comme un placement sûr pour les compagnies d’assurance car elles offrent un flux de revenus régulier et des remboursements garantis. Les compagnies d’assurance investissent souvent dans des obligations à long terme pour financer les engagements de polices d’assurance. Les taux d’intérêt peuvent varier de 2% à 4%. Moyennant un calcul actuariel, les compagnies d’assurances peuvent optimiser la trésorerie en faisant coïncider les flux sortants (paiements les engagements de polices d’assurances vie) et les flux entrants des rendements des placements effectués. D’où l’importance du calcul des durations.

Les compagnies d’assurance peuvent également investir dans des actions qui peuvent offrir des rendements plus élevés que les obligations, mais sont plus risquées. Les rendements des actions peuvent varier considérablement en fonction de la performance de l’entreprise et du marché boursier. De plus, les compagnies d’assurance peuvent investir dans des biens immobiliers commerciaux ou résidentiels pour diversifier leur portefeuille et accroître les rendements. Les rendements de l’immobilier peuvent varier considérablement en fonction de la performance du marché immobilier local.

Quels sont les risques sur ces placements ? Une probable faillite d’une banque ?

En général, la faillite d’une banque peut être déclenchée par des pertes importantes sur des prêts non remboursés, une mauvaise gestion des actifs, des fraudes, des activités illégales et des conditions économiques difficiles. Lorsqu’une banque fait faillite, elle peut soit être liquidée, ce qui signifie que ses actifs sont vendus et ses créanciers sont remboursés en fonction de l’ordre de priorité des créances. Soit être reprise par une autre banque. Les autorités de réglementation bancaire aux États-Unis, comme la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), interviennent pour protéger les déposants, en garantissant leurs dépôts jusqu’à un certain montant, franchise dans le jargon des assurances, généralement 250 000 dollars par compte. Les banques qui font faillite peuvent également recevoir une assistance financière de la part du gouvernement, comme ce fut le cas pendant la crise financière de 2008.

Les autorités américaines ont déclaré, le 10 mars 2023, la faillite de la Silicon Valley Bank. Deux jours après, Signature Bank a été fermée. D’autres banques risquent de connaître le même sort. Comment expliquez-vous cette situation qui menace toute l’industrie bancaire américaine et qui n’est pas sans conséquences sur l’économie mondiale ?

Une baisse du financement en capital-risque dans l’industrie technologique et la hausse des taux d’intérêt ont forcé la SVB à l’insolvabilité. Cet effondrement constitue la deuxième plus grande faillite bancaire de l’histoire des États-Unis, après celle de Washington Mutual en 2008.

Les faillites récentes de la Silicon Valley Bank et de Signature Bank suscitent une crise de confiance dans le secteur. De nombreux clients de banques similaires ont retiré leur argent pour le déposer dans des banques plus grandes, comme JPMorgan Chase ou Bank of America, considérées comme trop importantes pour que l’Etat ne les renfloue pas en cas de crise. L’analyste financier, Charles Gave, préconise le retour au système de banques régionales, de tailles moindres, pour éviter qu’il y ait ce phénomène de «migration» vers les grandes banques. La banque First Republic, qui sert principalement des clients fortunés, a vu sa valorisation en Bourse fondre de 80%. C’est la 14ème banque américaine par la taille des actifs.

Que faire ? Une garantie d’Etat inconditionnelle. C’est l’arme qu’une coalition de banques américaines préconise d’utiliser pour éviter la contagion bancaire après la faillite de la Silicon Valley Bank. Ces établissements de taille moyenne ont demandé aux régulateurs fédéraux de garantir, pendant deux ans, temps nécessaire pour rétablir la confiance, tous les dépôts de leurs clients, même au-dessus de la limite habituelle des 250 000 dollars.

Cette mesure stopperait l’exode des clients des plus petites banques, stabiliserait le secteur bancaire et réduirait les risques d’autres faillites. La coalition de banques américaines estime que la confiance a été érodée pour toutes les banques sauf les plus grandes. Elle appelle notamment la FDIC, la réserve fédérale (Fed) et la ministre de l’Economie Janet Yellen à «restaurer la confiance».

Le groupe de banques propose d’augmenter le montant des cotisations qu’elles versent déjà à la FDIC pour garantir les dépôts. Onze grandes banques américaines se seraient engagées à déposer un montant global de 30 milliards de dollars sur les comptes de First Republic.

K. M.

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