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Rapport du FMI sur l’Algérie: Eclairage de M. Souhil Meddah, expert en ingénierie financière et capitalisation

Dans ce deuxième entretien que l’expert financier accorde à Algerieinvest, nous essayons de comprendre les dernières recommandations du FMI, portant notamment sur le resserrement de la politique monétaire de la Banque centrale algérienne. M. Meddah souligne que le FMI est en train d’agir de façon globale et mondiale, dans un contexte d’inflation galopante dans les économies puissantes connues pour être des locomotives de la demande mondiale en énergies et produits bruts. Une probable baisse de la croissance mondiale ne sera pas sans impact direct et indirect sur les autres économies y compris celles qui manifestent des capacités à adopter des formes de consommation plus importantes. D’où l’appel à adopter des politiques monétaires restrictives.

Reste le classement des dépenses d’équipements au même titre que les dépenses de fonctionnement. Le spécialiste estime que cela est injustifiable du fait que le besoin en investissement en Algérie reste important et que la forme de la demande publique en équipements a toujours donné des résultats positifs sur la croissance et la taille du PIB.

Par ailleurs, interrogé sur l’élargissement des prérogatives du Conseil de la monnaie et du crédit, dans le projet de loi sur la monnaie et le crédit, M. Meddah assure que cela va permettre au CMC de reprendre son rôle de force d’accompagnement et de régulation, avec modulation de tous types de ressources.

Entretien réalisé par: Hakima Laouli

Algerieinvest : Dans son dernier rapport sur l’Algérie, le FMI recommande à la Banque d’Algérie de resserrer sa politique monétaire. Que cela signifie-t-il exactement ? Quels en seraient les résultats à court et moyen termes ?

M. Souhil Meddah : A la lecture du rapport du conseil d’administration du FMI, il est bien clair que la batterie de recommandations faites s’articulent autour d’une intention consolidée avec le reste des économies du monde pour faire face, avant tout, à la problématique de l’inflation galopante qui touche l’ensemble des économies structurantes dans le monde et affecte, de facto, tous les espaces qui leur sont directement ou indirectement connectés. A l’image de la FED, le FMI cherche à orienter toutes les autres instances monétaires y compris la Banque d’Algérie pour adopter des politiques plus ou moins restrictives, mais de façon conjoncturelle. Cette voie de recommandation réclame comme but, d’obtenir des formes de blocage de cette situation inflationniste qui touche le monde occidentale et les économies dominantes, avant de se déverser sur des espaces de consommation qui, de façon mécanique, ré-amplifient et multiplient les effets de cette situation qui demeure pour le moment très peu contrôlable. Sauf si elle trouve des espaces absorbeurs par l’effet des rotations de l’activité sur le marché réel de la demande.

Il n’est cependant pas exclu que cette recommandation ne soit pas également destinée aux autres économies, notamment celles qui manifestent leurs capacités à adopter des formes de consommation plus importantes, sachant que le circuit productif au sein des puissances économiques s’oriente vers la maîtrise de l’inflation au détriment d’une croissance de reprise post-Covid plus opportuniste à deux chiffres. Dans ce sens et dans le cas où le volume de la demande et de la consommation demeure élevé, au bénéfice d’une ou de plusieurs politiques monétaires expansives, la problématique inflationniste sera encore plus importante et influera sur les niveaux des prix dans l’ensemble des marchés internationaux.

De ce fait, notre économie doit réellement composer avec les autres espaces internationaux et interagir avec les effets pouvant se manifester, en fonction de la contribution implicite ou explicite que pourra fournir notre marché de la demande par rapport aux canaux de distribution et de revente ou de la production des biens et services qui émanent de l’extérieur. Sachant que le FMI ne peut pas, en même temps, se conformer avec une politique protectionniste sur le moyen et le long terme. 

Relever le taux directeur est-il nécessaire en ce moment précis où la politique gouvernementale favorise justement la croissance par la consommation ?

Chaque forme structurelle adoptée doit cesser totalement ou partiellement lorsque la conjoncture ne permet pas sa soutenabilité ou son émergence. A ce titre, le FMI est en train d’agir de façon globale et mondiale, en essayant d’émettre des recommandations dans un esprit consolidé entre pays ou groupes de pays. Maintenant, il reste à nos pouvoirs publics de réagir ou non à cette nouvelle formulation qui demeure une recommandation.

A juste titre, et avec les agrégats actuels, la croissance par la consommation ne permet pas que ce modèle soit soutenable immédiatement chez les économies qui sont dotées de plus de moyens offreurs de biens et de services. Le but souhaité étant de maîtriser l’inflation avant de recommencer le circuit de croissance par la consommation. Les décisions macroéconomiques composent toujours avec un ou plusieurs équilibres sur les agrégats les plus fondamentaux, qui se croisent entre eux et qui nécessitent systématiquement des régulations ou des redimensionnements pragmatiques réguliers.

Le FMI appelle également à une réduction des dépenses, y compris ceux d’investissement et relance la question sur les subventions. En même temps, il évoque des risques liés à la réduction des importations. Quelle est votre lecture de ces recommandations ?

Le FMI, dans son rapport, se projette sur plusieurs hypothèses, y compris celles qui prévoit un probable ralentissement de la croissance mondiale ou sur une possible situation récessioniste du fait que la croissance dans les économies puissantes caractérisées par leur rôle de locomotives de la demande mondiale en énergies et produits bruts, puisse être limitée ou baisser subitement. Ceci peut ensuite provoquer des baisses mondiales sur la demande, accompagnées de chutes relatives des prix du baril, sans oublier la quote-part du gaz qui lui est assignée. Il s’agit d’une forme classique d’observations et de recommandations qui tient compte de la taille de l’équilibre budgétaire et de la nature de son déficit ou de la dette publique, le cas échéant. Mais dans cette perspective, ce qui n’est pas justifiable, c’est le fait de classer les dépenses d’équipements au même titre que les dépenses de fonctionnement, sachant que le besoin en investissement chez nous reste important et que la forme de la demande publique en équipements a toujours donné des résultats positifs sur la croissance et la taille du PIB. Sans qu’elle n’affecte le niveau de la dette publique par rapport aux ressources allouées, surtout que les crédits de paiement sont plus étendus dans le temps par rapport aux autorisations de programmes

Le projet de loi sur la monnaie et le crédit a été présenté par le ministre des Finances, M. Brahim Djamel Kassali, jeudi dernier, devant la commission des finances et du budget de l’APN. Comment analysez-vous les amendements annoncés, en ce qui concerne notamment l’élargissement des prérogatives du Conseil de la monnaie et du crédit ?

C’est l’effet conjoncturel qui implique les quelques reformes structurelles, y compris celles relatives au mode de fonctionnement des institutions. Dans ce sens, le CMC sera fatalement appelé à se joindre aux autres structures décisionnelles, ce qui devra donner des montages structuraux capables de répondre aux besoins des niches dans lesquelles la politique monétaire sera appelée à donner des solutions techniques. Il s’agit notamment des formations des institutions ou des banques d’investissement qui se chargeront à la fois de soutenir les actes d’amorçage pour le compte des investissements en cours de réalisation ou de démarrage, et d’autre part, assureront les actions de transmission en forme d’accompagnement transitoire au profits de investisseurs qui veulent se constituer en forces et se convertir en capitaines d’industrie. Le CMC qui subissait, entre autres, les dictats des plans de l’exécutif doit reprendre désormais sa position de force d’accompagnement et de régulation, avec modulation de tous types de ressources.

H. L.

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