Mohammed Arezki LOUNIS KHODJA : Hommage au père du patronat Algérien

Il y a tout juste 30 ans, nous quittait Mohammed Arezki LOUNIS KHODJA (12 Décembre 1930 – 26 Janvier 1991). Le parcours de ce grand homme aura été tout simplement époustouflant au regard de la courte période de vie qu’il a vécu ici-bas. Moudjahid de la première heure, il activa très tôt au sein de la Zone Autonome d’Alger de l’Organisation Civile du Front de Libération Nationale (OC/FLN), prisonnier de guerre (1957/1962), il connut les affres de la torture au point ou ses codétenus et compagnons de cellule le prirent pour mort lorsque ses tortionnaires le remirent dans sa cellule de la prison de Serkadji de sinistre mémoire.
Mais les hommes de la trempe de Si Rezki ont la peau dure, il survécu et au lendemain du recouvrement de l’indépendance (20 Octobre 1963), avec quelques compagnons, il créa la première entreprise de construction du secteur prive national, la SNATPB, Société Nord-Africaine de Travaux Publics et Bâtiments pour se consacrer résolument dans l’effort de reconstruction du pays.
Avec cet outil de réalisation, il mena a bien d’importants projets industriels pour le compte exclusif de l’Etat et de ses démembrements tels que l’emblématique Complexe sidérurgique d’El Hadjar ( Aciérie, le laminoir à chaud et à froid, la tuberie sans soudure) ainsi que les Gros œuvres des cimenteries de Meftah, Hadjar Soud, Constantine-Hamma Bouziane et celle de Oued Sly (Chlef) au sujet duquel projet il s’enorgueillissait et qu’il considérait comme sa fierté en raison de la résistance que cette superstructure opposa au terrible séisme qui dévasta cette région du pays en Octobre 1980, le mérite revenant en premier lieu aux ingénieurs et techniciens du CTC ainsi qu’aux moyens humains et matériels colossaux mis en œuvre par la SNATPB et non pas exclusivement aux japonais de KAWASAKI, comme voulaient le soutenir déjà mais en vain quelques détracteurs.
Avec cette entreprise, Mohammed Arezki LOUNIS KHODJA réalisa d’autres projets d’intérêt national dédiés à l’industrie du textile et du cuir ; ceux de Draa Ben Khadda et de Tlelat qui abrite aujourd’hui une usine de montage de véhicules ; il y a lieu de citer aussi les usines de tannage de peaux à Jijel de chaussures a Dellys. L’expérience acquise accumulée permit à la SNATPB la construction de la Station de traitements des eaux usées du Fergoug El Mohammadia, sans omettre la construction de Centre de formation Professionnelle, de lycées et collèges, les sucreries raffineries de Guelma et de Khemis Milliana. Peut de gens savent que la mythique salle HARCHA porte la marque de la SNATPB. Comme il faut citer la réalisation de plus d’un millier de logements sociaux dans la wilaya de Annaba non sans difficultés toutefois.
La SNATPB étant bien intégrée dans le paysage économique, Mohammed Arezki LOUNIS KHODJA jugea indispensable et autrement plus utile pour plus d’efficacité, d’élargir le champ d’intervention dans ce secteur d’activités, il s’engagea dans la création et l’acquisition d’autres entreprises et sociétés.
C’est ainsi qu’il créa la société TPGM, spécialisée dans la gestion de matériels de travaux publics, la société SEMOPLATRE, spécialisée dans la fabrication de modules en plâtres, panneaux plâtres entre autres. Tout comme il réalisa l’acquisition d’une importante société de construction auprès de propriétaires étrangers, la spa SEGNA qu’il ne tarda pas à algérianiser totalement ; cette société réalisa d’importants projets tels que les hôpitaux de Draa El Mizan, d’Azzazga et de Sidi Ghiles de 240 lits chacun sans faire face faut-il le préciser à d’innombrables contraintes notamment administratives.
La spa SEGNA a à son actif la réalisation de près de 2000 logements sociaux type clés en mains, réalisés à l’aide d’usines mobiles dits « Coffrages Tunnels » que la spa SEGNA introduisit pour la première fois en Algérie en 1975. Cette société réalisa également la station de traitements des eaux de Médéa.
L’intense activité que Mohammed Arezki déploya avec brio faut-il le préciser ne l’écarta pas de certaines positions vis-à-vis de ces collègues entrepreneurs qui subissaient les difficultés et contraintes de tous ordres au même titre que lui d’ailleurs. Ainsi, il prit l’initiative de rassembler les entrepreneurs activant sur l’ensemble du territoire national pour former la première organisation d’entrepreneurs du BTPH, l’UGEA, Union Générale des Entrepreneurs Algériens dont il fut le premier Président, afin de défendre leurs intérêts moraux et matériels dans le cadre de la loi relative aux organisations syndicales.
Les nouvelles dispositions promulguées par les pouvoirs publics en matière d’ouverture économique, ont incité Mohammed Arezki LOUNIS KHODJA, à prendre l’initiative d’une large concertation avec les opérateurs économiques des autres secteurs d’activités, pour créer la première organisation patronale à caractère syndicale. La CGOEA, Confédération Générale des Operateurs Economiques Algériens, est ainsi crée ; et dont il assura la Présidence de son Bureau Exécutif jusqu’à son décès.
En homme avise, conscient des enjeux économiques au niveau régional comme au niveau international et la place et le rôle de l’Algérie dans le concert des nations, il fit adhérer la CGOEA a l’O.I.E, Organisation Internationale des Employeurs ainsi qu’a la C.P.E, Confédération Panafricaine des Employeurs dont était le Trésorier. Mohammed Arezki LOUNIS KHODJA fut élu membre adjoint du Conseil d’Administration du B.I.T, Bureau International du Travail, organe exécutif de l’Organisation International du Travail, membre de l’ONU.
Homme infatigable, républicain et nationaliste jusqu’au bout des doigts, il représenta dignement les employeurs algériens (publics et prives), membre des délégations tripartites du pays a l’occasion de plusieurs sessions annuelles de la Conférence Internationale du Travail a Genève.
Aujourd’hui comme hier ses amis, ses collaborateurs et tous ceux qui l’ont connu y compris ses « adversaires » de l’époque reconnaissent en lui un homme affable, généreux mais aussi un professionnel accompli, lui témoignent beaucoup de considération et énormément de respect.