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L’écosystème entrepreneurial en Algérie, De quoi parle-t-on ?

Soutenir la création d’un environnement favorable à l’entrepreneuriat pour nos jeunes créateurs d’entreprises, oui c’est possible, mais…

Depuis deux décennies, il existe en Algérie toute une multitude d’organismes et d’institutions et de programmes publics et privés dont le but consiste à promouvoir et soutenir l’entrepreneuriat, fort de constater au jour d’aujourd’hui et en dépit des efforts déployés par les pouvoirs publics, cet écosystème entrepreneurial peine à assurer sa mission pour créer une réelle dynamique de l’entreprenariat en Algérie.

Pourquoi ?

Pour deux simples raisons, à savoir :

– Les acteurs de cet écosystème n’ont pas la même vision

– Le manque de coordination entre les différents acteurs de cet écosystème

A l’heure actuelle, des obstacles importants dans l’écosystème entravent la croissance et la compétitivité des entreprises quelques soient leurs tailles.

L’urgence est de mettre en place un environnement favorable à l’entrepreneuriat  «un écosystème entrepreneurial» pour booster la création des entreprises, la stimulation et la promotion de l’entreprenariat en Algérie, et de ce fait, impulser une nouvelle dynamique dans la pratique des affaires pour l’émergence d’une nouvelle génération d’entrepreneurs et managers, où les jeunes  ‘hommes et femmes’ seront particulièrement appelés à jouer un rôle déterminant dans le développement économique de notre pays.

Permettez-moi avant d’aborder ce sujet, de donner quelques éléments sur l’écosystème entrepreneurial.

Il faut savoir que le terme de l’écosystème est emprunté pour la première fois en biologie par le botaniste anglais George Tansley en 1935. Son but était de définir un ensemble dynamique comprenant un milieu biotope ou naturel (climat, sol, eau et autres éléments inorganiques) et la biocénose ou les êtres vivants (microorganismes, animaux, plantes,) qui s’y trouvent.

Le phénomène de l’écosystème est utilisé dans le champ de l’entrepreneuriat sous le concept « écosystème entrepreneurial ». En 1988, le terme d’écosystème fut emprunté par Valdez J pour la première fois dans son article « The entrepreneurial écosystem: toward a theory of new firm formation », a pour but d’analyser le phénomène des start-up qui englobe les conditions de marchés actuelles, l’environnement immédiat et le résultat des relations d’entrepreneurs potentiels. Toutefois, la recherche académique sur l’écosystème entrepreneurial a émergé qu’à partir des années 2000 et est devenue culminant depuis les années 2016.

Le modèle de Forum Économique Mondial Le Forum Économique Mondial (World Economic Forum, 2013) a proposé huit piliers importants d’un écosystème entrepreneurial dans une région : 1. Des marchés accessibles (marchés locaux et étrangers, grandes entreprises en tant que clients, petites et moyennes entreprises en tant que clients, gouvernements en tant que clients, marché étranger.) ; 2. Le capital humain et la main-d’œuvre (compétences managériales, compétences techniques, possibilité de sous-traitance, accès à la main-d’œuvre issue de l’immigration, etc.) ; 3. L’investissement et la finance (famille et ami, business angels, capital-risque, accès aux prêts, etc.) ; 4. Le système de soutien (conseil, mentorat), l’existence (et la qualité), du mentorat et de conseillers, de services professionnels, d’incubateurs et d’accélérateurs et de réseaux d’entrepreneurs) ; 5. Le cadre réglementaire et infrastructures (politique fiscale incitative, facilité pour le démarrage d’une entreprise, accès aux infrastructures de base [eau, électricité], accès aux télécommunications/à la bande passante, accès aux transports, politiques et législation favorable aux affaires) ; 6. L’éducation et la formation (formation spécifique pour les entrepreneurs, mains-d’œuvre disponibles ayant une formation universitaire, main-d’œuvre disponible ayant une formation pré-universitaire) ; 7. Les grandes universités comme catalyseurs (elles jouent un rôle clé dans la fourniture de diplômés aux nouvelles entreprises, dans le développement de nouvelles idées de création d’entreprise, et elles promeuvent une culture de respect de l’entrepreneuriat) ; 8. Le soutien culturel tolérance au risque et à l’échec – Préférence pour le travail indépendant.

Quelle est la situation actuelle en Algérie?

L’Algérie à l’instar des autres pays du monde entier a connu ces dernières années

une situation économique les plus difficiles, la baisse vertigineuse du prix du baril de pétrole, l’inflation, le taux de chômage  qui ne cesse d’augmenter d’année en année, ajouté à cela, le choc massif et brutal produit par la pandémie de coronavirus (COVID-19) ou l’Algérie n’a pas échappé et continue de subir à ce jour les conséquences de cette situation désastreuse pour notre économie dépendante à 95% des exportations des hydrocarbures.

Des chiffres alarmants qui montrent la gravité de la situation économique et sociale que traverse notre pays où la fonction publique ne peut malheureusement pas absorber toute la demande des jeunes chômeurs.

Les très petites et moyennes entreprises « TPME », constituent une large frange du secteur économique nationale, soit 95%/, elles sont confrontées malheureusement à des problèmes spécifiques incombant à l’insuffisance de leur taille critique et aux aspects liés à la difficulté d’accès au financement, au manque de visibilité, de gestion stratégique des compétences et d’innovation, ainsi qu’à la difficulté d’accès à certains marchés de taille importante. Selon les statistiques, elles sont au nombre de 15 753 TPE au 1er semestre 2020, fort probablement moins durant l’exercice du 1er trimestre 2021, à être actives officiellement à l’échelle nationale, leurs participation est modeste dans le PIB national, c’est en deçà des aspirations des pouvoirs publics.

Malgré les efforts déployés par les pouvoirs publics ces deux dernières années, plusieurs initiatives visant à encourager la création d’entreprise et à promouvoir l’esprit d’entreprise, notamment encourager les chômeurs et les étudiants diplômés à développer leur propre emploi à travers la création d’entreprise et Start-up et ce, grâce à de nouveaux mécanismes de financement mis en place par les pouvoirs publics. On conçoit alors l’importance de l’entrepreneuriat comme une des solutions alternative pour le développement économique, social et environnemental de notre pays.

Envisager l’entrepreneuriat comme option de carrière pour les jeunes et les soutenir pour mener à terme leur projet aideront à réduire le taux de chômage, oui c’est possible, mais ils ne peuvent pas être tous des entrepreneurs. Même si l’Etat a fourni des efforts pour favoriser l’esprit entrepreneurial et inciter les jeunes à la création d’entreprise à travers les différents dispositifs mis en place ‘ ANSEJ, actuellement ANADE, CNAC, ANGEM dès les années 2000, époque où on voulait gagner la paix sociale en mettant à la disposition de ces jeunes des crédits pour la création de leurs entreprises sans s’y être préparé.

Le résultat au jour d’aujourd’hui est alarmant, des dettes qui s’accumulent, les remboursements des crédits non honorés, des entreprises en faillites, etc… très peu ont réussi à s’imposer et avoir une part de marché.

La volonté des pouvoirs publics actuels est certes présente, la création des deux Ministères chargés de la micro-entreprise et les Start-ups en est la preuve pour encourager les jeunes à s’intéresser davantage à l’entrepreneuriat et aux Start-ups.

Malgré, la création de nouvelles structures d’appui et d’incitations et diverses initiatives et mesures mis en place par les pouvoirs publics, parmi les acteurs les plus importants, on citera les dispositifs d’aide et soutien à la création d’entreprise à l’image de : la Caisse Nationale d’Assurance Chômage (CNAC), l’Agence Nationale d’Appui et de Développement de l’Entreprenariat (ANADE-ex-ANSEJ), l’Agence Nationale de Gestion du Microcrédit (ANGEM), les incubateurs universitaires, les pépinières d’entreprises les centres de facilitation, les maisons de l’entrepreneuriat , les incubateurs des parcs technologiques mis en place par l’Agence nationale de promotion et de développement des parcs technologiques (ANPT), les accélérateurs, les programmes de formation dédiés aux jeunes soit par les instituts ou les associations, etc., mais la culture entrepreneuriale reste peu répandue en Algérie et le manque de coordination entre ces différentes structures qui demeure aujourd’hui un frein majeur à l’expansion de cet esprit entrepreneurial bien que nous l’avons déjà signalé à chaque fois que l’occasion se présente pour attirer l’attention des pouvoirs publics de la nécessité de la mise en place d’un écosystème attractif pour soutenir et promouvoir l’entrepreneuriat en Algérie.

La question qui reste à poser est la suivante :

  • Est-ce que l’écosystème entrepreneurial Algérien favorise l’entrepreneuriat des jeunes hommes et femmes?

Pour répondre à cette question il y a lieu à mon sens de réaliser une étude approfondie de l’écosystème entrepreneurial en Algérie, même si elle doit prendre le temps qu’il faudra, le résultat de cette étude est très important pour les pouvoirs publics en général et pour les départements ministériels en charge de ces activités.

L’étude doit toucher entre autre sur la dynamique du marché intérieur, l’ouverture du marché intérieur, les normes socioculturelles, les transferts en Recherche et développement, l’infrastructure physique, l’infrastructure légale et commerciale, le financement, la politique gouvernementale, les programmes et les actions spécifiques, l’enseignement et la formation, les taxes et la bureaucratie, etc…, sans oublié aussi l’identification du potentiel de chaque territoire -wilaya.

Pourquoi ?

L’étude une fois réalisée permettra d’identifier les points forts et faibles de ce qui a été réalisé à ce jour en termes de politique entrepreneurial en Algérie, capitaliser les points forts et améliorer les points faibles, d’où, la nécessité d’associer à cette étude, la réalisation des études de wilayas, sachant que chaque wilaya  a ses propres spécificités, cette l’étude de wilaya permettra d’avoir un état des lieux  à travers l’analyse SWOT (forces, faiblesses, opportunités et menaces), la situation des niveaux de compétitivité du territoire, l’identification  des opportunités réelles d’investissements, identification  des potentiels des infrastructures liées au savoir (Universités, centres de formation professionnelle, laboratoire et centre de recherche…), identification  des besoins des TPME par wilaya pour cerner au mieux la problématique de développement local.

Elle identifiera aussi les situations favorables et défavorables pour les porteurs de projets ainsi que pour les futurs jeunes entrepreneurs en particulier au sein de l’écosystème en Algérie, d’autant plus qu’actuellement le niveau d’activité entrepreneuriale chez nos jeunes est faible ces derniers temps, nécessite une nouvelle vision, une nouvelle stratégie entrepreneurial et une réforme souple de l’écosystème entrepreneurial tout en respectant la culture et la spécificité territoriale.

A signaler que dans le cadre de la nouvelle stratégie du gouvernement, une grande attention a été accordée à la promotion de l’entreprenariat en Algérie, la rentabilité et le rendement de l’entreprise Algérienne en général et de la TPME en particulier, qui sont en partie tributaires de son écosystème.

Recommandations :

Création d’un Observatoire National de l’Entrepreneuriat

Eu égard à ce qui précède, nous proposons la mise en place « d’un Observatoire National de de l’Entrepreneuriat » qui aura pour missions, de dresser en premier lieu un état des lieux des besoins, attentes, et difficultés rencontrées par les entrepreneurs en Algérie, notamment en matière de création, l’accompagnement et le financement de leur entreprise.

« Un observatoire national de l’entrepreneuriat » comme un espace de concertation et de partage entre les différents acteurs qui gravitent autour de l’écosystème entrepreneurial, composé des représentants des institutions et organismes en relation avec l’entrepreneuriat, des experts en matière de création et développement des micro-entreprises et Start-ups , des chercheurs universitaires, il aura pour mission :

  • de mettre en œuvre un plan d’action annuel dans le but de simplifier les procédures administratives afin de lutter contre la bureaucratie qui entrave l’acte d’entreprendre ;
  • Nous suggérons de mettre en place « un guichet unique » au niveau de chaque dispositif pour l’accomplissement des formalités administratives de création d’entreprise,
  • Faire des propositions aux hautes autorités pour prévoir des réformes de la règlementation et la législation nécessaires à la promotion des écosystèmes entrepreneuriaux et renforcer les dispositifs afin d’appuyer la création et le développement des micro-entreprises et des Start-Ups;
  • Coordonner avec tous les secteurs d’activités pour la promotion de l’entrepreneuriat en Algérie,
  • Réfléchir aussi sur des nouvelles mesures incitatives et innovatrices pour instaurer un climat propice à la stimulation de l’entrepreneuriat, la création et le développement des micro-entreprises et Start-ups par un ensemble des incitations spécifiques,
  • De suivre la démographie des TPME en termes de création, de cessation et de changement d’activités,
  • De réaliser des études de filières pour permettre la réalisation des fiches projets des filières porteuses pour chaque wilaya et notes de conjoncture périodiques sur les tendances générales de la TPME par wilaya,
  • De promouvoir en relation avec les institutions et organismes concernés, l’innovation technologique et l’usage par la TPME des nouvelles technologies de l’information et de la communication,
  • De collecter, d’exploiter et de diffuser l’information spécifique au domaine d’activités des TPME; de coordonner, en relation avec les structures concernées, entre les différents programmes entrepreneurial du secteur à mettre en œuvre au profit de la TPME.

L’observatoire de l’entrepreneuriat aura ainsi « une vision commune » entre les différentes institutions, organismes et acteurs et « coordonnera » les différentes actions à entreprendre entre les différentes structures pour la stimulation et la promotion de l’entrepreneuriat en Algérie.

 De ce fait, l’écosystème entrepreneurial à mettre en place pourra répondre favorablement aux attentes des entrepreneurs en général et aux porteurs de projets en particulier.

Mourad Bergheul

Expert Consultant formateur en entrepreneuriat      

North Africa Energy & Hydrogen Exhibition and Conference
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