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Sécurité maritime : la culture du risque, clé pour éviter les détentions de navires

Former, communiquer, prévenir, des leviers humains pour renforcer la sécurité en mer

Lors du Forum Maritime tenu à Alger le 16 décembre, experts et responsables ont souligné le rôle fondamental du facteur humain dans la sécurisation des navires. Entre erreurs humaines, détentions et classifications à risques, le débat a mis en lumière la nécessité d’ancrer une véritable culture de la sécurité à bord, au-delà des simples procédures.

Par Khaled Remouche

Le Forum Maritime d’Alger, organisé le mercredi 16 avril à l’hôtel Mercure, a placé la sécurité maritime au cœur des discussions. Une thématique essentielle dans un contexte international marqué par une recrudescence des incidents en mer et des exigences accrues en matière de conformité.

Les intervenants ont particulièrement insisté sur le facteur humain comme levier central de maîtrise des risques. Il ne suffit plus de se conformer aux normes techniques : la sécurité dépend aussi de la culture de bord, de la communication entre membres d’équipage et du niveau de formation des marins.

Le Directeur de l’Institut Supérieur Maritime, M. Kerma, a illustré ce propos par une analyse comparative entre deux compagnies maritimes algériennes. La première se conforme strictement au code ISM, qui repose sur l’application de procédures standards. Cependant, cette approche, bien que réglementaire, montre ses limites. À l’inverse, la compagnie la plus performante s’appuie, en complément, sur un autre référentiel spécifique aux navires pétroliers, intégrant une dimension essentielle : le management du risque et un chapitre entier dédié à la culture de sécurité.

Selon M. Kerma, une réelle amélioration des performances passe par une transformation des mentalités à bord. Il recommande un outil de gestion de la culture maritime, destiné à ancrer la sécurité comme valeur fondamentale. Le partage d’expériences, la circulation fluide de l’information, l’esprit d’équipage et la communication entre officiers et subalternes seraient les véritables remparts contre les accidents.

De son côté, M. Rezal, représentant du ministère des Transports, a rappelé l’ampleur des pertes enregistrées à l’échelle mondiale. Entre 2014 et 2023, 27 000 incidents et accidents maritimes ont été recensés, dont 526 pertes totales de navires. En 2023 à elle seule, 2 600 incidents ont été rapportés, avec 26 navires complètement perdus. Les navires les plus concernés sont les cargos, les bateaux de pêche et les paquebots, opérant principalement en Mer du Nord et en Méditerranée, identifiées comme les zones les plus à risque.

Les causes principales des pertes sont les naufrages, les échouements, les incendies, les explosions et les pannes de machines. Fait alarmant : selon les données présentées, 80 % des incidents sont dus à des erreurs humaines, dont la moitié serait liée aux comportements individuels, et l’autre à des actions humaines inadaptées.

Said Khenissa, ancien commandant de bord et expert maritime, a apporté un éclairage spécifique sur la situation du pavillon national algérien, actuellement classé en liste noire. Ce classement découle du nombre élevé de détentions de navires battant pavillon algérien : 12 cas recensés. Une situation préoccupante qui entraîne des sanctions automatiques de la part de certaines autorités portuaires étrangères.

Selon l’expert, les pavillons sont classés selon trois niveaux de risque : high risk (liste noire), standard risk (liste grise) et low risk (liste blanche). Les navires à haut risque subissent des inspections tous les cinq à six mois, contre dix à vingt mois pour ceux en risque standard, et jusqu’à 36 mois pour les navires classés à faible risque.

Pour sortir de la zone rouge, M. Khenissa recommande une série de mesures concrètes : généraliser la maintenance préventive, organiser des audits indépendants, et surtout, instaurer un mécanisme systématique de retour d’expérience entre commandants de bord et administration maritime.

L’ensemble des interventions converge vers une même conclusion : renforcer la sécurité maritime en Algérie nécessite un changement de paradigme. La culture du risque, la responsabilisation des équipages et l’investissement dans la formation sont des piliers indispensables pour améliorer l’image du pavillon national et réduire durablement les détentions.

K.R.

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