ActualitésDéveloppement durableÉnergieInvestissement

IA et énergie : un mariage puissant aux conséquences climatiques contrastées

L’intelligence artificielle transforme le secteur énergétique mais alourdit aussi sa consommation électrique.

L’essor fulgurant de l’intelligence artificielle (IA) redéfinit l’économie mondiale. Pourtant, derrière les promesses d’efficacité et d’innovation, se cachent des défis énergétiques colossaux. Alimentée par des centres de données très énergivores, l’IA pourrait aggraver le changement climatique autant qu’elle pourrait contribuer à le combattre. Dans un rapport publié le 17 juin 2025, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dresse un panorama inédit des interactions entre l’intelligence artificielle et le secteur de l’énergie. Intitulé « L’IA et l’énergie : le double impact », ce document s’appuie sur de nouvelles modélisations, des données mondiales et régionales ainsi qu’une large consultation d’acteurs publics et privés – gouvernements, régulateurs, entreprises technologiques et énergétiques, experts internationaux. L’objectif : comprendre les effets croisés de l’essor de l’IA sur la consommation électrique, les émissions, la sécurité énergétique et les coûts d’accès à l’énergie, tout en évaluant le potentiel de l’IA pour transformer le fonctionnement du système énergétique mondial. Un éclairage essentiel alors que l’IA devient un pilier central de l’économie numérique.

Par Mehdi Maarouf

La montée en puissance de l’intelligence artificielle repose sur trois leviers : la disponibilité croissante des données, les progrès technologiques fulgurants, et la baisse des coûts de calcul. Elle est désormais omniprésente : des robots industriels aux véhicules autonomes, en passant par la médecine ou les systèmes de surveillance d’infrastructures. Mais cette révolution numérique a un coût énergétique élevé, surtout dans les centres de données, dont certains consomment autant d’électricité que 100 000 foyers — voire vingt fois plus pour les plus puissants en construction.

Les centres de données représentaient environ 1,5 % de la consommation mondiale d’électricité en 2024, et cette part pourrait atteindre près de 1 200 TWh d’ici 2035, soit l’équivalent de la consommation annuelle actuelle du Japon. Environ 50 % de cette croissance sera assurée par les énergies renouvelables, mais le gaz naturel, le nucléaire et la géothermie auront aussi leur rôle à jouer. Toutefois, cette expansion rapide provoque des tensions sur les réseaux électriques, allonge les délais de raccordement et génère des goulots d’étranglement critiques, en particulier dans les économies avancées.

Malgré ces impacts, l’IA pourrait générer des réductions d’émissions significatives dans les secteurs à forte intensité énergétique. Dans l’industrie, elle optimise les processus et améliore l’efficacité énergétique. Dans les transports, elle permet une meilleure gestion du trafic et la maintenance prédictive. Dans les bâtiments, elle réduit jusqu’à 10 % de la consommation d’énergie via la gestion intelligente du chauffage et de la climatisation. Si ces applications étaient généralisées, elles pourraient permettre de réduire les émissions de CO₂ d’environ 5 % à l’échelle mondiale d’ici 2035.

Mais ces promesses restent conditionnelles. L’absence d’infrastructures adaptées, le manque de compétences en IA dans le secteur énergétique, les obstacles réglementaires, ainsi que les risques de cybersécurité et les effets de rebond (comme le report vers la voiture autonome au détriment des transports publics) pourraient limiter les bénéfices environnementaux. L’IA peut donc être un levier, mais elle ne remplacera jamais une politique climatique proactive, rappellent les experts.

L’IA accélère aussi l’innovation scientifique, un facteur clé pour relever les défis énergétiques de demain. Elle permet de tester plus rapidement de nouveaux matériaux pour les batteries ou les panneaux solaires, réduisant ainsi les délais de développement des technologies bas carbone. Pourtant, seuls 2 % des investissements dans les start-up de l’énergie concernent actuellement des projets liés à l’IA, un signe que son potentiel reste largement sous-exploité.

Enfin, dans les économies émergentes, l’IA peut jouer un rôle transformateur, à condition que l’accès à une électricité fiable et abordable soit garanti. Ces pays comptent la moitié des utilisateurs d’Internet dans le monde, mais ne concentrent que 10 % des centres de données. Le déploiement local de ces infrastructures, combiné à des stratégies d’électrification intelligentes, pourrait stimuler l’emploi, l’innovation et l’inclusion numérique. Pour cela, une collaboration plus étroite entre les secteurs technologique et énergétique est indispensable afin d’aligner les besoins numériques avec les objectifs climatiques.

Lire le rapport ICI

M.M.

North Africa Energy & Hydrogen Exhibition and Conference
Afficher plus

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page

Adblock détecté

S'il vous plaît envisager de nous soutenir en désactivant votre bloqueur de publicité