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Transport maritime : vers la fin de l’obligation de propriété pour les armateurs

Abdelkrim Rezal, conseiller au ministère des Transports, fait le point sur la libéralisation du secteur

Alors que l’Algérie cherche à dynamiser son secteur maritime, la réforme du code en cours prévoit une mesure majeure : permettre aux opérateurs d’exploiter des navires sans en être propriétaires. Dans cet entretien, Abdelkrim Rezal, conseiller au ministère des Transports et expert maritime, revient sur cette évolution législative, les difficultés rencontrées par les acteurs privés, ainsi que les efforts engagés pour renforcer la sécurité et améliorer la performance du pavillon national. Nous l’avons rencontré au Forum maritime du 16 avril à Alger. Entretien

Entretien réalisé par : Khaled Remouche

Algérieinvest: Où en est l’ouverture du marché algérien du transport maritime ?

M. A. Rezal: Le secteur du transport maritime a été libéralisé. Il existe un dispositif réglementaire qui encadre l’octroi de concessions. Certaines entreprises publiques comme Madar ont obtenu des concessions. Il y a également quelques initiatives privées : Noris El Bahr a reçu une concession pour le transport des voyageurs. Cette compagnie est désormais opérationnelle. Aurès, une autre société privée, a aussi obtenu une concession pour exploiter des navires rouliers à passagers.

Madar, de son côté, prévoit de se lancer dans le transport de vrac. Mais l’ouverture au secteur privé rencontre un frein majeur : le financement. L’acquisition d’un navire coûte énormément d’argent. C’est pour cela qu’il n’y a pas un engouement pour la création de nouvelles compagnies maritimes.

Pour surmonter cette contrainte, les opérateurs ont demandé l’autorisation d’affréter des navires. Le gouvernement va-t-il répondre favorablement ?

Nous sommes en train d’amender le code maritime. Certaines dispositions sont en cours de modification, notamment celle qui conditionne le statut d’armateur à la possession de navires. L’objectif est de libéraliser l’affrètement. Autrement dit, permettre à un opérateur d’exploiter un navire sans en être propriétaire. Le texte amendé est finalisé au niveau du Secrétariat général du gouvernement.

Comment a évolué la sécurité maritime au niveau international ?

Compte tenu de la complexité de l’activité maritime, exposée à de multiples risques, la communauté internationale a mis en place des conventions, des règles et des normes strictes. Elles concernent la construction des navires, leur équipement, leur exploitation et leur gestion. À chaque accident majeur ayant des conséquences humaines ou environnementales, des enquêtes sont menées pour en comprendre les causes et éviter leur répétition. C’est une dynamique continue, amorcée depuis des événements historiques comme le naufrage du Titanic.

Qu’en est-il des accidents enregistrés en Algérie ?

L’Algérie n’est pas restée en marge. Entre 2000 et 2005, plusieurs accidents ont été recensés : le navire Béchar a coulé au port d’Alger, un autre a échoué aux Sablettes, d’autres incidents ont eu lieu dans plusieurs ports. Heureusement, aucun de ces navires ne transportait d’hydrocarbures.

Quelles sont les causes de ces accidents ?

Généralement, il s’agit de conditions météorologiques défavorables qui provoquent des échouements ou des chavirements. Mais ce type d’événements se produit dans tous les pays. Ce qui compte, c’est de disposer des capacités pour y faire face. Aujourd’hui, l’Algérie a renforcé ses moyens : remorqueurs de haute mer, hélicoptères de sauvetage, vedettes de secours, centres opérationnels de recherche et de sauvetage. Nous pouvons intervenir efficacement, que ce soit dans les ports, le long des côtes ou en haute mer.

Quel est votre avis sur le niveau de sécurité dans le transport maritime national ?

La sécurité maritime doit être une préoccupation permanente. Il n’existe pas de risque zéro. Il faut garantir que nos navires sont conformes aux normes, que les équipages sont qualifiés et compétents, et que tous les moyens de sécurité sont opérationnels. Nous devons respecter nos engagements en tant qu’État du pavillon, en assurant des inspections régulières et en assistant les navires, qu’ils soient algériens ou étrangers.

Pourquoi le pavillon algérien est-il classé sur la liste noire ?

Ce classement résulte d’un système mis en place par les pays européens pour évaluer les navires accostant dans leurs ports. Il repose sur la fréquence des rétentions lors des inspections. Si celles-ci sont rares, le pavillon est sur la liste blanche. Si elles sont modérées, il est sur la liste grise. Une fréquence élevée le place sur la liste noire. Cela ne signifie pas que nos navires sont systématiquement non conformes, mais cela pousse à maintenir un haut niveau de conformité.

Que faut-il faire pour sortir de cette liste noire ?

Comme l’a expliqué l’expert maritime Khenissa, il faut agir à plusieurs niveaux : mise à niveau des navires, préinspections, formation des équipages, sensibilisation à la conformité. On commence à voir les résultats : plusieurs inspections ont révélé zéro non-conformité. Si cela se maintient pendant trois ans, nous pouvons passer à la liste grise, puis viser la liste blanche. C’est un effort continu, qui demande persévérance et vigilance.

Quel rôle joue la formation dans la sécurité maritime ?

L’élément humain est fondamental. Il faut former non seulement les équipages, mais aussi toutes les personnes impliquées dans la gestion technique, les affrètements, l’armement. Il faut reconstruire les métiers que possédait la CNAN à son apogée. La formation peut se faire en Algérie comme à l’étranger. L’École nationale supérieure maritime de Bou Ismaïl propose des formations de post-graduation en sécurité maritime, suivies par les cadres des garde-côtes. Il serait souhaitable que les compagnies maritimes nationales envoient aussi leur personnel.

K.R.

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